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Interview de Dominique Besnehard au Festival de Brides-les-Bains

Dominique Besnehard et son actrice fétiche Loubna Abidar à Brides les Bains. Crédit photo: ®Christophe-Stramba
Dominique Besnehard et son actrice fétiche Loubna Abidar à Brides les Bains.
Crédit photo: ®Christophe-Stramba

Dominique Besnehard est certainement l’un des personnages les plus emblématiques du cinéma français. Ce passionné, véritable touche-à-tout, constitue un levier essentiel pour la réussite d’un film ou d’un comédien. C’est à Brides-les-Bains, durant le Festival du film francophone, que nous avons pu faire la connaissance de cet homme sensible et toujours disponible.

Il nous parle du métier d’agent artistique, de “Much Loved”, chef-d’œuvre présenté à Brides, et de son actrice principale Loubna Abidar. Il évoque également “Dix pour cent”, l’excellente série mise en scène par Cédric Klapisch, dont il est le producteur.
Interview de Dominique Besnehard au Festival de Brides-les-Bains

Bonjour Dominique, vous qui êtes un découvreur de talents, quel est celui dont vous êtes le plus fier ?

Bonjour Laurent, il est compliqué de répondre à cette question. À mes yeux, une actrice absolument remarquable, mais qui n’a pas fait la carrière espérée, un peu à cause d’elle d’ailleurs, c’est Béatrice Dalle.
C’est une très grande comédienne, en plus d’être une vraie nature. Elle aura vécu les aléas de sa vie personnelle, elle est très romanesque.
Elle a été découverte sur une photo, Hollywood l’a appelée, elle n’y est pas allée. Elle a fait un film culte, 37°2 le matin, et elle a connu aussi les faits divers.
C’est une immense actrice, un vrai personnage comme Arletty, qui a également eu un destin particulier.
Il y a d’autres actrices que j’ai beaucoup aimées, Juliette Binoche, Emmanuelle Seigner ou encore Eva Green, que j’ai envoyée prendre des cours d’art dramatique, j’étais très lié avec sa mère (Marlène Jobert, ndlr).
Mais découvreur de talents, cela veut dire quoi ? Cela veut dire découvrir des gens qui vous touchent, dans un théâtre ou lors d’un casting. Après, c’est au metteur en scène de les choisir et aux comédiens de faire le reste.

Est-il vrai que vous êtes devenu un passionné de cinéma à l’âge de 7 ans ?

Mon père était figurant, il habitait Bois-Colombes. Un jour, on lui a demandé de faire de la figuration dans “L’affaire d’une nuit” avec Roger Hanin et Pascale Petit.
C’est le premier tournage auquel j’ai assisté et j’avais à peine 7 ans. Effectivement, cela m’a marqué, mais j’ai toujours aimé me déguiser quand j’étais gosse.

J’ai été fan de télévision très tôt. À l’époque, il n’y avait qu’une chaîne, et en noir et blanc. Mon grand-père avait la chance d’avoir une télévision, il était fan de Charles de Gaulle.
Du coup, j’allais passer mes week-ends à la campagne non pas pour les champs, mais pour regarder la télévision à côté de lui.
J’ai tout de suite été baigné dans le monde de l’image. Aujourd’hui, les gens naissent avec. Nous, nous n’avions que la radio et une seule chaîne de télé.
Mais c’est vraiment à la campagne, chez mon grand père et devant sa télé, que je suis tombé amoureux de l’audiovisuel.

Dominique Besnehard et Frédéric Bel à Brides-Les-Bains. Crédit photo:®Christophe-Stramba
Dominique Besnehard et Frédérique Bel à Brides-Les-Bains.
Crédit photo:®Christophe-Stramba

Pourriez-vous nous expliquer, Dominique, ce qu’il s’est réellement passé avec Ségolène Royal ?

Avec Ségolène, cela a été un engagement à fond sur la campagne de 2007, je reste de gauche même s’ils font des bêtises.
J’ai aimé cette femme, j’ai cru en elle, je lui ai apporté un soutien affectif, mais ce fut moins bien par la suite. Elle est passée à autre chose.

Cela remonte à huit ans et pourtant, on m’en parle encore. J’y ai cru, je me suis engagé, mais les politiques n’ont pas les mêmes sentiments que les artistes.
On peut se fâcher mais on ne tue pas. Les politiques peuvent vous tuer. Moi, elle a essayé de me tuer en m’écartant violemment.
J’ai créé le Festival d’Angoulême avec son soutien et d’un seul coup, elle s’est retirée du projet.
Mais ce n’est pas très grave. Il y a beaucoup plus important dans la  vie que Ségolène Royal.

Qu’êtes-vous venu faire de beau à Brides-les-Bains ?

J’adore Brides-les-Bains. Depuis 1991, je m’y ressource. Boire l’eau de cette ville et faire un bon régime quand on n’a pas une hygiène de vie parfaite, cela fait beaucoup de bien.
Et puis, il y a l’air pur. C’est une ville sereine, on se laisse porter par l’air, l’eau et les massages, j’aime beaucoup cet endroit.

Un film vous a beaucoup marqué durant ce festival, il s’agit de “Much Loved”, avec la comédienne Loubna Abidar, pourriez-vous nous en dire un mot ?

J’adore ce film, je l’avais déjà vu à Cannes où il a été acclamé par une salle en délire. Je vais à Cannes pour rencontrer des gens et m’occuper de mes productions, mais aussi pour voir des films.
Je suis un fervent spectateur de Nabil Ayouch. Je me suis dit “je prends ce film pour Angoulême” et s’il gagne, je l’emmènerai ensuite à Brides-les-Bains. “Much Loved” est financé par la France, il avait donc toute sa place dans ce festival. Je suis un grand féministe, et ce film dénonce à quel point on traite mal les femmes au Maroc.
J’ai été porté par ce film et Loubna est extraordinaire. Pour moi, il était évident de soutenir ce film à Angoulême.
Et j’ai eu raison puisqu’il a obtenu le Valois d’Or et le Valois de la meilleure actrice.
Je suis très attaché à Loubna Abidar, très belle, très talentueuse et militante ; je la compare à Eva Peron que j’aime beaucoup.

Bominique Besnehard et son équipe à Brides-Les-Bains.
Bominique Besnehard et son équipe à Brides-Les-Bains.

Vous devez présenter durant ce festival une série qui s’appelle ” Dix pour cent”, pourriez-vous nous en parler ?

Il s’agit d’une série que j’ai produite avec Carole Valentin. Mes vingt ans de carrière en tant qu’agent artistique, j’ai proposé à France 2 d’en faire une comédie, une série de six épisodes de 52 minutes. On y parle du métier d’agent, de l’entreprise, et elle est réalisée par le grand Cédric Klapisch. Elle traite des rapports entre l’art et le monde de l’argent.

Dans chaque épisode, figure un acteur célèbre qui joue son propre rôle. Il y a, par exemple, Joey Starr et Julie Gayet, un couple d’acteurs qui ne s’entend pas, Laura Smet et sa mère (Nathalie Baye, ndlr), Cécile de France, François Berléand ou encore Audrey Fleurot.

Dans le métier d’agent artistique, on fait ou on détruit des carrières, c’est aussi manichéen que cela ?

Non, je ne dirais pas cela. On peut aider à monter une carrière, on peut prendre en main le destin d’un acteur, le conseiller sur le contrat et les choix artistiques, mais c’est quand même lui qui décide. S’il n’a pas envie de faire un film, vous pourrez lui expliquer qu’il doit impérativement le faire, il aura toujours le dernier mot.
Nous sommes simplement là pour le conseiller.
Je dis toujours une chose : quand cela marche très fort, c’est parce qu’ils ont choisi le rôle, quand cela ne marche pas, c’est de la faute à l’agent.

Votre mot de la fin, Dominique ?

Je souhaite que l’on fasse une troisième édition à Brides-les-Bains et je suis très heureux de voir les spectateurs répondre présents, encore plus nombreux que l’année dernière.

Propos recueillis par Laurent Amar

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